EUREKA VISIONSDe l'émotion, pas d'illusions.
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Eric TABARLY
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"Adieu cher Camarade ... Adieu faut se quitter" EricTabarly parlait peu mais il aimait chanter.En société, il ne fallait pas le prier longtemps pour qu'il interprète ses chansons préférées. Des chansons de marin, des vrais d'autrefois; des airs sans doute appris à l'aube de sa carrière dans la Marine, en 1953. Sa voix imposait naturellement le silence autour de lui. Son interprétation, très juste, nuancée, personnelle, retenait l'attention et dominait seule une timide reprise en choeur. Fany de Laninon avait sa préférence. Dans sa bouche, les couplets de Mac Orlan rendait vie auRecouvrance d'avant - guerre et chacun ressentait la profondeur de cette chanson dont le rythme plaisant laisse oublier la tragédie qu'elle évoque. Le 30 mai dernier, lors du dîner de gala de la fête organisée à Bénodet par son épouse Jacqueline, pour célébrer les 100 ans de Pen Duick, il avait chanter Fanny a capella et, à la demande générale, entonné Adieu cher camarade, la vieille et émouvante chanson du gaillard d'avant. Eric avait inspiré, il y a quelques années, la création des Coffres de la Marine, une chorale amateur qui se réunissait au musée de la Marine pour apprendre les chansons de son répertoire. Parmi les amis que Jacqueline Tabarly avait réunis le 30 mai dernier, il y avait plusieur coffres qu'Eric a invités à chanter avec lui. Leurs voix n'étaient pas toujours aussi justes que celle de leur maître. Ils pleurent aujourd'hui sa disparition et ne chanteront plus jamais, sans penser à lui, lles derniers vers de sa chanson préférée... Et j'sais bien qu'ma dernière chance S'ra d'faire mon trou dans l'eau... CF Serge Thébaut |
"L'exemple" "Les français n'ont pas le sens maritime" regrette-t-on souvent.Cette dimension de la Mer, indispensable à la vie et à la survie d'une nation comme la nôtre, comment mieux le faire connaitre, respecter, entrer normalement dans nos moeurs politiques, nos pensées stratégiques, nos habitudes sociologiques ? Il a appartenu a un officier de Marine, Eric Tabarly, de réussir à populariser la Mer. Sans aucune concession, en restant parfaitement droit, clair, honnête. Lui -même. Et par la voile : ses victoires répétées sur le plan international ont fait comprendre aux français que nous avions des marins, les meilleurs, et donc que la Mer existait. Pas seulement comme thème d'évasion. Pas seulement comme une coûteuse fantaisie de plaisancier. Non, comme un métier sérieux, un risque assumé, une volonté d'être meilleur et de se dépasser. Une vie.Il est un souvenir émouvant pour tous ceux qui ont été ses équipiers (et je le fus modestement sur le premier Pen Duick, celui qui vient de voir sa disparition) et qui compte aujourd'hui tous les grands noms de la voile et de la course au large, mais aussi un modèle pour tous les français qui va bien au- delà de la voile. Il appartient, m'a t-il semblé, à la Marine Nationale de lui rendre cet hommage solennel que nous lui devons. Jean François Deniau de l' Académie française |
extraits de Col Bleus n° 2445 du 20 Juin 1998 |
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